Cela fait quelques jours que les feux foisonnent à nouveau dans toutes les directions depuis notre poste d’observation à la Cathédrale. Dans les quelques coins restés verts de la plantation ou aux abords de la plantation les gens sont à nouveau occupés à préparer des champs pour replanter du maïs dont la première récolte se termine. On nous dit qu’ils profitent de la “petite” saison sèche, mais cette saison est toute relative car il a plu abondamment il y a à peine quatre jours, certains drains sont même encore remplis d’eau boueuse qui font le bonheur des cochons dont on voit des familles entières se prélasser dans la fraîcheur des ces mares.
Rien à voir avec la vraie saison sèche ou la végétation prend une tournure brunâtre et pendant laquelle il y a une brume quasi permanente qui nous empêche de voir le Kasaï dans la vallée en contre-bas, ici la vue reste claire, mais il y a les feux. Le danger pour nos plantations est donc beaucoup moindre car la végétation est luxuriante et peu sensible au feu si elle n’a pas été coupée et “séchée” au préalable. Nous avons du mal à maintenir l’herbe devant la maison à une hauteur raisonnable, au point que j’envisage sérieusement d’investir dans une tondeuse pour remplacer nos coupes-coupes (espèce de longue machette au bout recourbé que l’on balance un peu comme un club de golf au ras du sol pour couper une petite touffe d’herbe à chaque passage) qui demandent beaucoup d’énergie, de patience et de dextérité pour arriver à une pelouse digne de ce nom.
Depuis le début de cette semaine je suis installé dans mon nouveau bureau et quel bonheur de passer d’une pièce assez sombre aux murs de couleur jaune malade avec pour seule vue une série de conteneurs peints en vert menthe à l’eau pour essayer de les faire fondre dans le paysage, à un bureau plein de lumière avec une vue imprenable sur le Kasaï et juste à côté de l’usine ou je puis maintenant me rendre en quelques minutes à pied. Nous devons encore terminer le périmètre clôturé afin d’inclure les bureaux dans celui de l’usine et créer un chemin d’accès direct du bureau à l’usine. Ce dernier point est peut-être le moins évident à régler car entre les deux il y a une ravine qui s’est formée avec le ruissellement des eaux des pluies et doit avoir entre 10 et 15m de profondeur, un mini canyon quoi. Pour faire simple nous avions décidé de poser un conteneur open top de 40 pieds (12m) au travers de la ravine dont les deux bouts sont ouverts. Un conteneur open top est, comme le nom l’indique, un conteneur qui n’est pas fermé au-dessus et comme la ravine ne fait pas plus de 4-5m de largeur un conteneur de ce type devrait être amplement suffisant pour nous permettre de passer d’un côté à l’autre sans trop de risques. La solution simple s’est révélée être plus compliquée que prévu, je vous passerai les détails car ils vous paraîtront exagérés, mais nous avions oublié le facteur “congolais” dans notre raisonnement et le résultat est que nous avons dû trouver une deuxième conteneur pour réaliser notre projet…
Un autre projet “simple” que notre nouveau responsable d’usine envisage de réaliser est d’amener un jetski ici pour pouvoir profiter de l’énorme étendue du Kasaï pendant ses heures de loisir. Il est vrai que ce serait génial de pouvoir aller d’ici à Ilebo en moins d’une demi-heure (nos derniers visiteurs ont mis plus de 5 heures par la route, sans compter la traversée en pirogue), mais je redoute l’aubaine que cela va représenter pour toutes nos autorités locales qui vont inventer des nouveaux droits, taxes et autres redevances avant même que l’engin n’ai fait ses premiers mètres dans l’eau. Ne soyons toutefois pas trop pessimistes, il suffira peut-être d’expliquer qu’il s’agit seulement d’une moto dont on a retiré les roues…
Les routes, eh oui cela ne s’arrange pas…
La route vers Kinshasa est comme vous le savez déjà difficile pour dire les choses de manière adoucies, mais jusqu’à présent nous arrivions à utiliser la route vers Ilebo de manière plus ou moins fiable. Cela ne semble plus le cas malgré les gros efforts d’entretien que nous faisons avec des cantonniers et nous devrons peut-être nous résoudre à envoyer bulldozer et niveleuse pour maintenir cette voie en état. Heureusement il reste la pirogue et depuis peu il y aurait une vedette “rapide” qui permet de rallier Ilebo depuis Mapangu en un peu moins de deux heures. La solution sera peut-être encore plus simple car je continue d’espérer que bientôt nous aurons notre liaison hebdomadaire par avion sur Mapangu, j’y travaille!
“Maman est occupée !” me suis-je surprise à répondre irritée au jardinier qui criait “maman, maman” de façon de plus en plus insistante pendant que je faisais sauter nos crêpes de Chandeleur, provoquant ainsi l’hilarité immédiate de l’un de nos lutins de maison.
Il faut dire qu’ici, même “papa Ambara” (Ambroise en fait) ancêtre cacochyme aux jambes arquées m’appelle “maman”, c’est une marque de déférence m’a t’on expliqué, instituée du temps de Mobutu. Je soupçonne, à l’heure actuelle, plus une façon de tenter de nous orienter vers un paternalisme, maternalisme en l’occurrence, principalement d’ordre pécunier, mais c’est peut être pure médisance de ma part…
Hier nous avons passé une agréable soirée entre “expatriés de tous poils” ( le consultant usine est camerounais et notre futur secrétaire général vient d’arriver de Kinshasa, très sympathique) chez le directeur Agro dans sa maison en bordure du Kasaï avec vue rapprochée de cette rivière magnifique encore éclairée de bancs de sable, les derniers piroguiers puis le crépuscule et le ballet des lucioles au son du concerto en grillons et grenouilles mineur, pas mal…
Et aujourd’hui, lunch sur la terrasse de la cathédrale avec une partie des mêmes participants. Agréables moments un peu perturbés par le spectacle des feux éclosant un peu partout dans la vue sur la plantation. “Feux pour préparer les cultures” m’a énoncé placidement un autre des lutins de maison…
Maintenant, c’est l’heure chaude, même les grillons semblent las, les coqs sont muets, les animaux affalés, il n’y a pas un souffle de vent et la terre attend la pluie.
Marc lit tranquillement et je vais aller le rejoindre, à bientôt vous de l’autre bout du monde!
Marie-Claude et Marc
For some days we see fires appearing again in all directions from our observation post in the Cathedral. In the few remaining slivers of forest of the plantation and around our concession people are again slashing and burning land in preparation of a new maize crop as the previous one is almost fully harvested. We are told that people take benefit of the “small” dry season, but this seems very relative as it rained rather heavily only four days ago and the road drains are still filled with muddy water, which are the delight of pigs with entire families indulging in the freshness of these ponds.
Nothing to compare with the “real” dry season, when most plants take a uniform brown hue and a permanent mist blocks the view of the Kasai river in the valley below, now the view is clear, but there are fires. The danger for our plantation is therefore much smaller because the plants are luxuriant and less likely to burn if they have not previously been slashed and partly “dried”. We struggle to keep the grass in front of the house under control, almost to the point that I am seriously thinking of purchasing a lawn mower to replace our “slashers” (using a kind of long curved machete that is swung back and forth just above ground level somewhat like a golf club to cut a small tuft of grass with each swing) that require a lot of energy, patience and skill to achieve a reasonably even surface.
Since the beginning of this week I have invested my new office and what a pleasure to have moved from a rather dark room with walls painted in a sick yellow colour with a view on a series of containers painted mint green to blend in the scenery to a brightly lit office overlooking the Kasai river and a few minutes walking distance from the factory. We still have to complete the fence that will enclose both offices and the factory and create a path linking both sites. This latter point is proving less obvious than it sounds because between the two sites run-off water has dug a 10-15m deep trench, a mini canyon of sorts. To make things simple we decided to lay a 40 foot (12m) open-top container across the ravine with both ends open. An open-top container is, as the name implies, a container without a top closure and because the trench is only about 4-5m wide it should be sufficiently long to make a safe pedestrian crossing. The “simple” solution turned out to be much more complicated than expected, I will leave the details for another time because they will sound a little extreme, but we had forgotten about the “Congolese” factor in our reasoning and as a consequence we had to find a second container to complete our project…
Another “simple” project being considered by our new factory head is to bring a jet-ski to the plantation to make use of the huge potential offered by the Kasai river during his leisure time. It is true that with such machine it would be possible to go from Mapangu to Ilebo in less than half an hour (our last visitors spent 5 hours on the road, not counting the time required to cross the river on a dugout canoe), but I fear the bonanza our local authorities will see in this to invent new taxes, rights or other duties to be paid event before the machine hits the water. Let’s not be too pessimistic, maybe it will be a matter of explaining that it is no more than a motorbike of which the wheels have been taken off…
The road, well things are not getting better…
The road to Kinshasa is as you already know “difficult” to say things mildly, but until now we could take the road towards Ilebo with the reasonable expectation of getting there without too much trouble. It is no longer the case, despite our efforts to employ workers from the neighbouring villages to maintain the road, and the only solution will probably be to send our bulldozer and grader to keep this national road passable. Fortunately we still have the option of going to Ilebo with a dugout canoe and recently there is reportedly a new “fast” boat linking Mapangu and Ilebo in a little under two hours. The solution will maybe be even simpler as I continue to hope that we will soon have a weekly flight between Mapangu and Kinshasa, I am working on it!
“Maman is busy!” I responded, surprising myself, to the gardener who kept calling me “maman, maman” while I was busy baking pancakes for Candlemas, to the great joy of one of our house leprechauns.
I must admit that even “papa Ambara” (Ambroisus in fact) who must be close to his nineties and walks as if he has just dismounted his pony also calls me “maman”, which is apparently a sign of respect that was instated by Mobutu, I am told.
I suspect, nowadays, more a way to point us towards paternalism, mothernalism rather and mainly for financial purposes, but I may be judging matters too harshly…
Yesterday we had a pleasant evening with the various “expatriates” (our consultant factory manager comes from Cameroun and our future secretary general just arrived from Kinshasa, very sympathetic) at the Agronomic Director’s house on the edge of the Kasai with a close view of this magnificent river lit by a few remaining sand banks, the last dugout canoes making their way home and then sunset with a ballet of fireflies and its concerto in minor of crickets and frogs, not bad…
Today, lunch on the terrace of the Cathedral with some of the same colleagues. Pleasant moments somewhat disturbed by the scene of fires being started here and there in our view of the plantation. “Fires to start the crops” the other Leprechaun of the house told me placidly…
Now it is the hottest time of the day, even the crickets seem subdued, the cockerels are mute, our animals spread out on the floor and there is no air movement whatsoever, the earth is waiting for the rain to come.
Marc is reading quietly and I am about to join him. Until soon you at the other end of the world!
Marie-Claude et Marc