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Il est indéniable que le temps passe à toute vitesse dans notre coin de brousse et cela est certainement en partie la conséquence du fait qu’ici il y a toujours quelque chose qui se passe, généralement surprenant ou inattendu, encore que maintenant nous commençons à prendre les choses avec un certain degré de fatalisme en sachant qu’ici c’est “normal”.
Cette semaine a encore une fois été pleine de surprises, de sourires (parfois un peu jaunes) et de stress, mais en réalité nous ne sommes plus vraiment étonnés car ici tout est possible…
Comme vous le savez par nos nouvelles précédentes, pour le moment nous avons de gros soucis avec nos engins “jaunes” et en particulier avec la pelle chargeuse qui est une machine essentielle pour le bon fonctionnement de l’huilerie. Outre la commande en urgence de pièces de rechange, nous avons profité de l’affrètement d’un avion pour faire venir deux techniciens spécialisés dans les engins Caterpillar, pensant (naïvement) que de cette manière les réparations seraient faites plus rapidement et dans les règles de l’art, et que notre machine pourrait au moins fonctionner sans souci jusqu’à la fin de la pointe de production (en septembre). Ces messieurs sont bien arrivés il y a un peu plus d’une semaine et ont passé le plus clair de leur temps derrière un ordinateur pour faire, ce qu’ils appellent, un diagnostic de la machine. Le rapport de ce travail se fait toujours attendre et laisse présumer qu’ils ne savent pas vraiment comment résoudre le problème, car ils ont suggéré de ramener l’engin à Kinshasa pour bien le réparer une fois pour toutes. Pour rappel, envoyer cet engin jusqu’à Kinshasa implique un voyage en barge de 3 semaines pour aller, un temps de réparation qu’ils estiment être “de maximum” 1 mois… et le voyage de retour en barge de 3-4 semaines. Ils nous proposent donc de prendre notre machine jusqu’à ce que notre pointe soit largement terminée, comme si c’était la solution la plus évidente. Ils ont été passablement choqués quand je leur ai expliqué qu’ils ont été payés pour venir réparer notre engin sur place et que, compte tenu de l’urgence, je ne prévoyais pas de mettre un moyen de transport à leur disposition pour rentrer à Kinshasa tant que cela n’était pas fait. Les techniciens ont laissé entendre qu’il serait peut-être souhaitable de faire venir une troisième personne mieux équipée pour faire les travaux (qui ne sont pas encore identifiés)… Rassurez-vous je n’ai encore tué ou même tapé personne, mais je ne vous cacherai pas que je suis en train de perdre mon calme.
Nous pensions avoir trouvé une autre pelle chargeuse qui pourrait nous dépanner sur un chantier minier près du chef-lieu de la province (Tshikapa), mais après plus de trois semaines d’excuses et d’explications variées pour justifier pourquoi cette machine n’a pas encore réussi à prendre la route, il est clair que ce n’est pas sur cette solution que nous devons compter.
Pour éviter ce genre de désagréments pour l’année prochaine, j’ai décidé de commander une nouvelle pelle chargeuse, mais qui ne pourra malheureusement pas être sur site dans les temps cette fois-ci car, évidemment, elle n’est pas disponible de stock en RDC.
Dans l’attente nous avons une nuée de personnes munies de pics et de pelles qui se chargent de manutentionner les régimes et les fruits que la plantation livre à l’huilerie et, de manière assez surprenante, permet à l’huilerie de fonctionner à plein régime avec des records de près de 600 tonnes de régimes traités en 24 heures et au moins 500 tonnes de moyenne sur les 7 jours de la semaine, alors que l’huilerie a été conçue pour une capacité nominale d’à peine 430 tonnes (ce qui aurait été généralement considéré comme une bonne performance). Comme quoi même dans les situations les plus extrêmes il est possible de trouver des solutions et d’atteindre des résultats surprenants.
A côté de cela nous continuons d’avoir nos petites anecdotes qui font sourire quand elles n’ont pas des conséquences trop graves. Ainsi cette semaine, l’un de nos chauffeurs de camion a décidé de démarrer son camion le matin en restant debout à l’extérieur, sous prétexte que le moteur devait chauffer tranquillement avant de pouvoir prendre la route. Cela était sans compter sur le fait que le camion était en vitesse (marche arrière) et qu’il s’est donc mis à reculer sans personne à bord dès que le moteur s’est mis en marche. Le camion a ainsi traversé la clôture du parking pour se retrouver avec les roues arrières pendant dans le vide de la ravine qui longe la clôture. Heureusement il n’y a pas eu de victime, le camion s’est arrêté à temps sans trop de casse (mis à part la clôture) et il a été assez facile de le repousser en place avec notre pelle à chenilles (qui heureusement fonctionne encore).
Un évènement que je trouve beaucoup moins “drôle” et que je n’arrive pas à comprendre concerne l’un des forages que nous avons réalisé dans la cité de Mapangu. Pour rappel, à Mapangu il n’y a pas d’eau et les seules possibilités pour avoir de l’eau est d’aller puiser celle-ci dans le Kasaï ou dans l’un de ces affluents (la rivière Mubende) où les gens se retrouvent par centaines debout dans l’eau qu’ils puisent pour ramener à la maison pour la cuisine et leurs autres besoins… La réalisation de forages permettant d’avoir de l’eau propre et potable (nous l’avons fait analyser dans un laboratoire spécialisé à Kinshasa) devrait donc être quelque chose de magnifique pour la population, du moins dans notre esprit. C’est donc avec désolation que nous avons découvert un matin que la clôture du forage avait été volée et la pompe endommagée au point qu’il n’est plus possible de puiser l’eau. Les gens se sont dit que Brabanta viendra réparer cela et ont été fort surpris quand je leur ai annoncé que nous envisagerions de réparer la pompe que lorsque la population aura refait la clôture et remis les lieux du forage en état. Malheureusement je ne suis pas du tout certain que cela permettra de résoudre la situation et je ne serai pas surpris si la population se contente d’utiliser l’un des deux autres forages que nous avons réalisé dans la cité de Mapangu ou simplement de continuer à puiser l’eau à la rivière.
Un des éléments de stress pour le moment est lié à la bonne performance de l’huilerie car cela veut aussi dire que nous produisons beaucoup d’huile et que nous devons évacuer celle-ci pour ne pas nous retrouver en manque de place de stockage. Sur papier, les barges qui sont programmées ont une capacité largement supérieure à la quantité d’huile que nous avons en stock ou à produire, mais en pratique… notre port est vide. Les transporteurs me promettent l’arrivée de leur barges demain ou après-demain au plus tard depuis plusieurs semaines, mais tout comme sœur Anne “Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie” (en fait, même pas car en saison sèche, elle “brunoie”) mais pas de barge à l’horizon. Nous avons jusqu’à lundi soir avant que nos cuves ne soient pleines et comme ici c’est le pays des surprises, je continue d’espérer que, comme par miracle, nos barges seront au port d’ici lundi matin (chose dûment promise par les armateurs).
A part cela, Mapangu a l’ambition d’être reconnu en tant que commune et pour cela tous les quartier et les rues doivent être marquées et nommées, ainsi je viens de découvrir qu’une des “rues” de Mapangu a été baptisée “avenue du Palmier Marc Van” (eh oui, ici le reste de mon nom est trop “compliqué”…) car il paraît que je fais maintenant partie de l’histoire de Mapangu (j’ai immédiatement ouvert un bouton de plus de ma chemise pour ne pas m’étouffer à cause de mon “dikke nek”).
N’hésitez pas à nous faire part de votre quotidien, même si différent il nous intéresse!
A bientôt vous lire,
Marc & Marie-Claude
It is undeniable that time is flying by in our corner of the bush and this is certainly partly the consequence of the fact that here there is always something going on, usually surprising or unexpected, although now we are beginning to take things with a certain degree of fatalism knowing that here it is “normal”.
This week has once again been full of surprises, smiles (sometimes a bit sour) and stress, but in reality we are not really surprised anymore because here everything is possible…
As you know from our previous news, at the moment we have serious problems with our “heavy” machines and in particular with the front loader which is an essential equipment for the good functioning of the oil mill. Apart from the emergency order of spare parts, we took advantage of the plane we chartered to bring two technicians specialized in Caterpillar machines to Mapangu, thinking (naively) that in this way repairs would be done more quickly, according to the rules of the trade, and that our machine could at least run without any worries until the end of the production peak (in September). These gentlemen arrived well over a week ago and spent most of their time behind a computer to do what they call a diagnosis of the machine. The report of this work is still pending and suggests that they don’t really know how to solve the problem, this seems to be confirmed by their suggestion to ship the machine back to Kinshasa to get it fixed once and for all. As a reminder, sending this machine to Kinshasa implies a barge trip of 3 weeks to go, a repair time they estimate to be “maximum” 1 month… and the return barge trip of 3-4 weeks. So they basically suggest to take our machine until our peak season is largely completed, as if it was the most obvious solution. They were quite shocked when I explained to them that they were paid to come and repair our machine here and that, given the urgency, I did not plan to put a means of transport at their disposal to return to Kinshasa until it was done. The technicians suggested that it might be advisable to bring in a third person better equipped to do the work (not yet identified). Don’t worry, I have not killed or even hit anyone yet, but I will not hide the fact that I am slowly reaching the end of my tether.
We thought we had found another front loader that could help us out at a mining site near the provincial capital (Tshikapa), but after more than three weeks of excuses and various explanations as to why this machine has not yet managed to hit the road, it is clear that this is not the solution we should rely on.
To avoid this kind of inconvenience for next year, I have decided to order a new front loader, but unfortunately it will not be available on site in time because, obviously, it is not available from stock in the DRC.
In the meantime we have a swarm of people with picks and shovels handling the bunches and fruit that the plantation delivers to the oil mill and, surprisingly enough, the oil mill is running at full capacity with records of nearly 600 tonnes of bunches processed in 24 hours and at least 500 tonnes averaged over the 7 days of the week, whereas the oil mill was designed for a nominal capacity of just 430 tonnes (which would have been generally considered a good performance). This means that even in the most extreme situations it is possible to find solutions and achieve surprising results.
Meanwhile, we continue to have our little anecdotes that make us smile as long as they don’t have too serious consequences. For example, this week one of our truck drivers decided to start his truck in the morning while standing outside, under the pretext that the engine had to warm up quietly before he could take to the road. This was without taking into account the fact that the truck was in gear (reverse) and so it started backing up without anyone on board as soon as the engine started. The truck then drove through the parking lot fence and found itself with the rear wheels hanging down in the gully along the fence. Luckily there were no casualties, the truck stopped in time without too much breakage (apart from the fence) and it was quite easy to push it back into place with our excavator (which fortunately still works).
An event that I find much less “funny” and that I can’t understand relates to one of the boreholes we established in the city of Mapangu. As a reminder, in Mapangu there is no water and the only possibility to get water is to go and draw it from the Kasai or from one of its tributaries (the Mubende river) where people find themselves by the hundreds standing in the water they draw to bring back home for cooking and other needs? The drilling of boreholes for clean, drinkable water (we had it analysed in a specialised laboratory in Kinshasa) should therefore be something wonderful for the population, at least in our minds. So it was with desolation that we discovered one morning that the fence of one of the boreholes had been stolen and the pump damaged to the point that it was no longer possible to draw water. People thought that Brabanta would come to repair this and were very surprised when I told them that we would not consider repairing the pump until the beneficiaries had rebuilt the fence and restored the drilling site. Unfortunately, I am not at all sure that this will solve the situation and I would not be surprised if the population just uses one of the other two boreholes we have made in the city of Mapangu or simply continues to draw water from the river.
One of the stresses at the moment is related to the good performance of the oil mill because it also means that we are producing a lot of oil and we have to evacuate it so we do not run out of storage space. On paper, the barges that are scheduled to come have a capacity far greater than the amount of oil we have in stock or plan to produce, but in practice… our port is empty. The transporters have been promising the arrival of their barges tomorrow or the day after tomorrow at the latest for the past several weeks, but just like Sister Anne “I see nothing but the sun, which makes a dust, and the grass, which looks green” (in fact, not even because in the dry season the grass looks brownish) but no barge on the horizon. We have until Monday evening before our tanks are full and as this is the land of surprises, I keep hoping that, as if by some miracle, our barges will be in port by Monday morning (something duly promised by the shipowners).
Apart from that, Mapangu has the ambition to be recognized as a commune and this requires all the quarters and streets to be marked and named, so I have just discovered that one of the “streets” of Mapangu has been named “avenue du Palmier Marc Van” (yes, here the rest of my full name is too “complicated”). …) because it seems that I am now part of Mapangu’s history (I immediately opened one more button on my shirt so I wouldn’t choke on my “dikke nek” – Flemish expression for pretentious people).
Don’t hesitate to tell us about your daily life, even if it’s different!
Hear from you soon,
Marc & Marie-Claude