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Beaucoup d’informations circulent, parfois à tort, sur le fait que les plantations de palmiers à huile sont responsables de déboisements massifs, de déplacements de populations et de nuisances environnementales. Il est indéniable que dans certains cas les palmiers ont été plantés sur des terres qui étaient autrefois boisées et qu’il est probable que dans certaines plantations des occupants des terres ont été déplacés ou relocalisés, mais même si les exceptions font la règle il est important de remettre les choses dans leur contexte.
Dans le livre “La palme des controverses” sur base de recherches d’Alain Rival et Patrice Levang, il apparaît que la vaste majorité des terres déboisées (environ 75%), en Asie du sud-est en général et Indonésie en particulier, l’ont été pour de l’exploitation forestière, de l’élevage ou des cultures telles que le soja et le riz et il est probable qu’en Afrique en général et en RDC en particulier cette proportion soit largement plus importante et que le palmier n’est pas la cause première de déboisement.
L’histoire de la plantation de Brabanta remonte à 1911 lorsqu’elle a été établie par William Lever en même temps que quatre autres plantations créées sous le nom d’Huileries du Congo dans ce qui était alors le Congo Belge. A cette époque il n’était pas encore vraiment question de plantations, mais plutôt de forêts de palmiers sauvages qui étaient exploitées pour être graduellement replantées avec des palmiers issus de graines “sélectionnées”. Ces activités ont été poursuivies sous cette forme jusqu’à l’indépendance pour ensuite être rebaptisées Plantations Lever au Zaïre (“PLZ”) sous le règne du Maréchal Mobutu et finalement être abandonnées dans les années 90 à cause des guerres et de l’effondrement des structures du pays.
Divers investisseurs tels que Socfin, Feronia, Blatner et Miluna ont repris une partie des plantations de PLZ au début des années 2000, mais il resterait encore près de 100.000 hectares de plantations de palmiers à huile abandonnées dans le pays et même à Brabanta des milliers d’hectares d’anciennes plantations n’ont pas été replantées à cause de leur accessibilité difficile ou d’autres problèmes logistiques pour leur exploitation. Il n’a donc généralement pas été nécessaire de détruire des forêts pour la revitalisation de ces plantations, même si certaines extensions expérimentales ont été faites sur des zones qui n’avaient pas été exploitées précédemment par PLZ, mais situées dans des zones de savane où la seule végétation est limitée à de l’herbe et quelques buissons épars et où la faune a totalement disparu des suites de brûlages “traditionnels” répétés plusieurs fois par an et une chasse sans merci pour toute chose vivante.
Après l’acquisition de la plantation de Brabanta par Socfin en 2007, il a été nécessaire de réhabiliter la plantation, ce qui a nécessité la replantation de palmiers, les palmiers existants étant devenus trop clairsemés, trop grands et de variétés peu productives, mais aussi de remettre en état les routes qui étaient tout juste accessibles en moto (et encore), de restaurer les maisons et en construire de nouvelles (encore que là le choix fait est bizarre, voir plus loin) et installer une huilerie. Plus de 6.000 hectares de palmiers ont été plantés après arrachage des anciens palmiers durant la période de 2009 à 2013, une partie de cette plantation a été faite sur des terrains en pente où il a été jugé préférable d’aménager des terrasses, lequel travail (terrasses) a été réalisé par des opérateur indonésiens qui savent faire ce genre d’opération les yeux fermés. Les vestiges de l’huilerie de la PLZ n’étant plus du tout utilisables, une nouvelle usine moderne a été commandée en Indonésie et aurait du être érigée au centre de la plantation. Mais c’était sans compter sur les initiatives politiques des dirigeants congolais qui fin 2011 ont promulgué une nouvelle loi (la loi sur les principes fondamentaux de l’agriculture) qui prévoit que toute entreprise agro-pastorale doit être détenue à 51% par un citoyen congolais. Les travaux étant lancés pour la plantation des palmiers, ceux-ci ont été poursuivis, mais les investisseurs ont préféré ne pas investir plusieurs dizaines de millions de dollars dans une huilerie dont ils auraient potentiellement donné la moitié à un partenaire local (probablement sans le sou). Pour ne pas perdre la production de la plantation récemment régénérée, il a été décidé de réhabiliter (de fait reconstruire) l’ancienne huilerie de PLZ dont la capacité est nettement moindre et surtout qui se trouve décentrée par rapport à la plantation. Il faut savoir que la plantation est traversée par une rivière, la Lumbundji, qui sépare la plantation en deux avec d’un côté les 3/4 de la plantation et de l’autre 1/4 de la plantation et l’huilerie, et qui ne peut être traversée que par un seul pont. Le pont (de type Bailey) en question date certainement de la période PLZ et, outre une usure normale, a souffert de nombreuses années de manque d’entretien ce qui a, peu à peu, rongé certains éléments essentiels de sa structure. Il est situé sur un tronçon de la route nationale qui traverse la plantation et dépend donc de l’autorité de l’Office des Routes de la RDC, mais ne reçoit aucune attention des autorités. Comme ce pont est un point critique pour l’exploitation de notre plantation, après une mission de contrôle d’un expert de Bailey il a été décidé d’acheter un nouveau pont afin de remplacer celui actuellement en place qui est susceptible de lâcher d’un jour à l’autre. Ici encore, c’est sans compter sur l’approche particulière des autorités compétentes qui ont décidé que tout travaux effectués sur des ouvrages du réseau national doivent être fait sous la supervision des experts de l’OR et qu’il était nécessaire de faire une mission de contrôle préalable (payable d’avance par le demandeur qui est Brabanta). Sur le principe il n’y a pas de problème fondamental, si ce n’est que les frais de cette mission d’exploration s’élèvent à un minimum de 125.000 dollars sans les “frais”, non-négociables. Nous avons donc opté, pour le moment, de garder toutes les pièces du nouveau pont dans des conteneurs scellés et de prier pour que le pont existant ne nous lâche pas trop vite. Nous faisons un entretien hebdomadaire du pont (structure et tablier), y compris le remplacement des pièces qui sont régulièrement volées, et grâce à cela il semble que la structure résiste au passage des camions qui font l’aller-retour presque jour et nuit pendant la période de pointe. Heureusement pour le moment nous sommes quasi les seuls à l’utiliser car la route qui sort de la plantation vers Idiofa (Kinshasa) est coupée (pas de bac) et les camions de commerçants (généralement surchargés) ne sont donc pas en mesure de passer par là.
Comme indiqué plus haut, il a été nécessaire de construire des nouvelles maisons en plus de celles, vestiges de la PLZ, qui avaient été restaurées. Ainsi quatre nouvelles habitations ont été construites, mais bizarrement il a été décidé de construire des maisons jumelées alors que d’une part l’espace ne manque pas et qu’en plus le seul élément commun des maisons jointives est un mur commun qui ne monte même pas jusqu’à la toiture laissant ainsi passer tous les bruits d’une habitation à l’autre. Comme nous avons maintenant besoin de moins d’expatriés pour la gestion de la plantation, l’une des constructions a été transformée en une seule maison ce qui permet à l’occupant (actuellement notre directrice agronomique) de pouvoir profiter pleinement du fait qu’elle vit en pleine nature sans devoir vivre avec les bruits d’un voisin tout proche.
Aujourd’hui la totalité de la plantation replantée est en production et malgré le fait que l’huilerie a une capacité inférieure à celle qui avait été prévue initialement, nos excédents de production non-usinables sont limités en quantité.
La plantation devrait pouvoir continuer à produire pendant encore près de vingt ans compte tenu du choix de matériel végétal à croissance réduite et ne nécessite donc plus de gros investissements, excepté ceux nécessaires pour le maintient de l’huilerie et du parc de véhicules et de générateurs. D’ici là il y aura probablement encore beaucoup de choses qui pourront se passer tant dans le développement de nouvelles sélections variétales pour la plantation que l’amélioration des techniques pour diminuer la dépendance de la plantation en énergies fossiles. Bien avant cela les populations riveraines auront complètement anéanti les quelques forêts restantes, sauf si des initiatives sont prises pour initier et encadrer les agriculteurs à faire des cultures sédentaires et enrichir le sol plutôt que brûler le tout pour y produire les aliments de base pendant un ou deux ans seulement. Si pas plantés avec des palmiers ou d’autres arbres, les milliers d’hectares de savane qui entourent la plantation pourraient être mis à profit pour faire des cultures alimentaires et/ou de l’élevage, mais cela ne semble pas encore être inscrit dans les objectifs de la population locale et ne le sera probablement jamais sans un encadrement et une vulgarisation qui ne pourra venir que de l’extérieur.
Comme chaque fois, nous vous invitons à nous faire part de vos nouvelles,
Marc & Marie-Claude
Much information is circulating, sometimes wrongly, about the fact that oil palm plantations are responsible for massive deforestation, population displacement and environmental damage. It is undeniable that in some cases the palms have been planted on land that was once forested and that in some plantations land occupants have probably been displaced or relocated, but even if exceptions are the rule it is important to put things in context.
In the book “La palme des controverses”, based on research by Alain Rival and Patrice Levang, it appears that the vast majority of deforested land (around 75%), in South-East Asia in general and Indonesia in particular, has been deforested for logging, animal husbandry or crops such as soya and rice, and it is likely that in Africa in general and the DRC in particular this proportion is much higher and that oil palms are not the prime cause of deforestation.
The history of the Brabanta plantation goes back to 1911 when it was established by William Lever together with four other plantations set up under the name of Huileries du Congo in what was then Belgian Congo. At that time they were not really plantations as we know them today, but rather about forests of wild palm trees that were being exploited to be gradually replanted with palms from “selected” seeds. These activities were continued in this form until independence and were then renamed Plantations Lever au Zaïre (“PLZ”) under the reign of Marshal Mobutu and finally abandoned in the 1990s due to the wars and the collapse of the country’s structures.
Various investors such as Socfin, Feronia, Blatner and Miluna took over part of the PLZ plantations in the early 2000s, but there are still an estimated 100,000 hectares of abandoned oil palm plantations in the country and even in the case of Brabanta thousands of hectares of old plantations have not been replanted because of difficult accessibility or other logistical problems for their exploitation. It has therefore generally not been necessary to destroy forests for the revitalisation of these plantations, although some experimental extensions have been made on areas not previously exploited by PLZ, but located in savannah areas where the only vegetation is limited to grass and a few scattered bushes, and where the fauna has totally disappeared as a result of “traditional” burns repeated several times a year as well as unrelented hunting of all creatures that happen to be spotted in the area.
After the acquisition of the Brabanta plantation by Socfin in 2007, it was necessary to rehabilitate the plantation, which required the replanting of palm trees, as the existing palm trees had become too sparse, too large and of poorly productive varieties, but also to rehabilitate the roads which were barely accessible by motorbike (and that is even an exageration), to restore the houses and build new ones (although here the choice made is odd, see below) and to install an oil mill. More than 6,000 hectares of palm trees were planted after uprooting the old palm trees during the period 2009 to 2013, part of this planting was done on sloping land where it was considered preferable to create terraces, which work (terraces) was carried out by Indonesian operators who know how to do this kind of work with their eyes closed. As the remains of the PLZ oil mill were no longer usable at all, a new, modern factory was ordered in Indonesia and should have been erected in the centre of the plantation. But this was without counting on the political initiatives of the Congolese leaders, who in late 2011 promulgated a new law (the Law on the Fundamental Principles of Agriculture) which stipulates that any agro-pastoral enterprise must be 51% owned by a Congolese citizen. As work began on the planting of palm trees, these were continued, but investors preferred not to invest several tens of millions of dollars in an oil mill, half of which they would have potentially given to a local partner (probably penniless). In order not to lose the production of the recently regenerated plantation, it was decided to rehabilitate (in fact rebuild) the old PLZ oil mill, which has a much smaller capacity and, above all, is off-centre to the plantation. It should be noted that the plantation is crossed by a river, the Lumbundji, which divides the plantation in two with 3/4 of the plantation on one side and 1/4 of the plantation and the oil mill on the other, and which can only be crossed by a single bridge. The bridge (Bailey type) in question certainly dates from the PLZ period and, apart from normal wear and tear, has suffered from many years of lack of maintenance, which has gradually eaten away at some essential elements of the structure. It is located on a section of the national road that runs through the plantation and therefore falls under the authority of the DRC Roads Office, but receives no attention from the authorities. As this bridge is a critical point for the exploitation of our plantation, after a control mission by an expert from Bailey it was decided to buy a new bridge to replace the one currently in place, which is likely to collapse any time. Here again, this was without relying on the particular approach of the competent authorities, who decided that any work carried out on works on the national network must be done under the supervision of the Roads Office experts and that it was necessary to carry out a prior control mission (payable in advance by the applicant who is Brabanta). In principle there is no fundamental problem with this requirement, except that the costs of this exploratory mission amount to a minimum of $125,000 non-negotiable and excluding “costs”. We have therefore opted, for the time being, to keep all the parts of the new bridge in sealed containers and to pray that the existing bridge will not give way too quickly. We do a weekly maintenance of the bridge (structure and deck) including the replacement of parts that are regularly stolen and thanks to this it seems that the structure resists the passage of trucks that make the round trip almost day and night during the peak period. Luckily at the moment we are almost the only ones using it because the road out of the plantation to Idiofa (Kinshasa) is out of use (no ferry) and the traders’ trucks (usually overloaded) are therefore unable to pass.
As mentioned above, it was necessary to build new houses in addition to the PLZ remnants which had been restored. Thus four new houses were built, but strangely enough it was decided to build semi-detached houses when on the one hand there is no lack of space and on the other hand the only common element of the attached houses is a common wall which does not even reach the roof, thus allowing all the noise to pass from one house to the other. As we now need fewer expatriates for the management of the plantation, one of the buildings has been transformed into a single house so that the occupant (currently our agronomy director) can take full advantage of the fact that she lives in the middle of nature without having to live with the noises of a close neighbour.
Today the entire replanted plantation is in production and despite the fact that the oil mill has a lower capacity than originally planned, our non-usable production surpluses are limited in quantity.
The plantation should be able to continue producing for another twenty years, given the choice of low-growth plant material and therefore no longer requires major investments, except for those necessary to maintain the oil mill and the fleet of vehicles and generators. In the meantime there is likely to be much more that can be done both in the development of new varietal selections for planting and in the improvement of techniques to reduce the plantation’s dependence on fossil fuels. Long before then the people living around the plantation will have completely destroyed the few remaining forests, unless initiatives are taken to initiate and mentor farmers to grow sedentary crops and enrich rather than burn the soil to produce staple foods. If not planted with palms or other trees, the thousands of hectares of savannah surrounding the plantation could be used for food crops and/or livestock, but this does not yet seem to be part of the local population’s objectives and will probably never be achieved without supervision and extension work that can only come from outside.
As always, we invite you to share your news with us,
Marc & Marie-Claude